Flora et Marie sont ergothérapeutes en libéral, formées à l’intégration sensorielle et au Snoezelen. Elles sont spécialisées dans l’accompagnement des enfants avec des troubles du spectre de l’autisme, des troubles alimentaires et l’accompagnement au guidage parental auprès des tout-petits. Marie et Flora proposent ici des activités pour effectuer des mini-pauses proprioceptives. Très conseillées à l’école, à la maison ou encore au cabinet, ces mini-pauses aident l’enfant à se concentrer.
Qu’est-ce que la proprioception ?
Nous possédons de nombreux récepteurs sensoriels qui nous permettent de percevoir, comprendre, organiser et moduler les informations provenant de notre corps et de notre environnement. Ces récepteurs sensoriels organisent les stimuli que nous percevons et nous permettent de répondre de manière adaptée aux sollicitations qui nous entourent. C’est l’intégration sensorielle.
Ces stimuli proviennent de 7 systèmes sensoriels principaux : visuel, tactile, auditif, olfactif, gustatif, vestibulaire et proprioceptif. La proprioception désigne la perception de la position des différentes parties de notre corps dans l’espace, en action ou au repos. Elle fait aussi partie des « systèmes sensoriels » qui peuvent être difficilement intégrés ou modulés chez certains enfants présentant des perturbations de leur(s) système(s) sensoriel(s).
D’après Sonya Côté (dans son ouvrage « Favoriser l’attention par des stratégies sensorielles : Outils et exercices pour aider tous les élèves ») :
La proprioception peut être stimulée par toute activité qui implique :
- Une compression des articulations : sauter, grimper, ramper, rouler, tomber, marcher ou courir ;
- Une force soutenue : soulever et/ou porter un objet lourd ;
- Une force dynamique : pousser ou tirer quelque chose, faire des pompes, etc. ;
- Une pression profonde sur les muscles : tenir un objet lourd contre soi, recevoir un câlin ou un massage.
En résumé, une activité proprioceptive permet de :
- Soulever, porter ;
- Pousser ou tirer ;
- Supporter d’avoir un poids sur ou contre soi ;
- Bouger tous ses membres de façon harmonieuse dans l’espace (balancements coordonnés des membres lors de la marche…) ;
- Connaître la position de chaque partie de son corps dans l’espace (exécuter des gestes à l’aveugle, connaître la distance entre deux membres, avoir une bonne coordination…).
>> À lire aussi : « Intégration sensorielle : J’équipe mon cabinet »
Des pauses proprioceptives pour encourager la concentration
Chez certains enfants, notamment ceux ayant un trouble du spectre autistique (TSA) ou avec un trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), l’intégration sensorielle peut être perturbée. Ces enfants vont alors développer des symptômes d’hyperréactivité. Le cerveau est submergé par un afflux trop important de stimulations sensorielles et il ne parvient plus à moduler ces informations.
Un enfant présentant des perturbations sensorielles met en place des réponses comportementales qui impactent fortement son quotidien et ses occupations. Les apprentissages scolaires peuvent compliqués, l’autonomie quotidienne restreinte, les interactions sociales limitées, les réactions émotionnelles difficiles à gérer pour l’entourage…
Pour un enfant avec une hypersensibilité et ayant des difficultés à rester concentrer, certaines activités peuvent l’aider à organiser les stimuli et moduler les informations qu’il perçoit afin de l’aider à un retour au calme. Ainsi, les activités qui stimulent la proprioception peuvent lui permettre d’être plus disponible pour les apprentissages. Celles-ci vont optimiser son état d’éveil et donc ses capacités attentionnelles. Nos récepteurs proprioceptifs peuvent avoir un effet calmant et canalisant pour le système nerveux. Le système proprioceptif peut inhiber certaines hyperstimulations présentes dans d’autres systèmes sensoriels.
20 mini-pauses avec un matériel spécifique
Nous vous proposons des activités pour faire des mini-pauses proprioceptives. Elles peuvent être conseillées à l’école, à la maison ou encore au cabinet, afin d’aider l’enfant à se concentrer.
1. Manipuler un fidget ou un handspinner
Un fidget tel que le handspinner est un petit objet à manipuler qui aide l’enfant à focaliser son attention sur une tâche secondaire. Cela engendre une stimulation sensori-motrice permettant de canaliser son besoin de mouvement par une manipulation proprioceptive sur l’objet. Tout en continuant à manipuler le fidget, l’enfant pourra de nouveau reporter son attention sur la tâche principale (écouter l’enseignant, manger son repas…).
>> À lire aussi : « les fidgets pour l’aider à se concentrer »
2. Malaxer une pâte ou une balle anti-stress
Les pâtes et balles, nécessitant un peu de force pour les malaxer, permettent de stimuler la proprioception des muscles de la main. Ce sont des objets anti-stress qui aident l’enfant à activer des pressions profondes dans sa main. Cette mini-pause proprioceptive l’apaisera et il pourra ainsi retrouver le seuil de concentration attendu.
3. Colorier/gribouiller énergiquement
Le coloriage ou le gribouillage énergique, avec un crayon de cire ou une craie par exemple, vont permettre à l’enfant de décharger toute son énergie sur la feuille de dessin. Ainsi, l’enfant pourra revenir au calme et reporter son attention sur le support, tout en stimulant ses capacités proprioceptives et graphomotrices.
4. Mâchouiller un embout de crayon ou un bijou en silicone
Les embouts et bijoux à mâchouiller permettent à l’enfant de mettre en place des stratégies d’autorégulation lorsqu’il ressent le besoin de mordre ou de mastiquer. De par la stimulation proprioceptive qu’ils procurent dans la bouche, ces objets peuvent permettre à l’enfant de diminuer son niveau d’anxiété et de répondre de façon plus adaptée à l’activité en cours (en classe, à la maison, au cabinet…).
>> À lire aussi : « Bien choisir son bijou de mastication
5. Poser une peluche ou une couverture lestée sur les jambes de l’enfant
Le poids d’une peluche ou d’une couverture lestée peut être apaisant de par ses propriétés enveloppantes, répartissant le poids de façon uniforme sur une partie du corps ayant besoin d’être contenue. La perception profonde du poids sur les jambes de l’enfant renforce la perception de son corps dans l’espace, et donc sa proprioception. Les peluches et les couvertures lestées peuvent être autant utilisées à l’école qu’à la maison, pour favoriser la concentration et la détente, notamment après une activité anxiogène. Attention toutefois à ne pas dépasser 10 % du poids de son corps.
Variante : L’enfant peut porter un coussin lesté sur le dos, en marchant comme une tortue ou un dromadaire, en essayer de ne pas le faire tomber.
>> À lire aussi : « Bien choisir et utiliser une couverture lestée »
6. S’enrouler dans une couverture ou se cacher dans un tunnel
S’enrouler dans une couverture, lestée ou non, ou se cacher dans un tunnel va apporter à l’enfant un effet « cocon » autour de son corps lui permettant de se blottir à l’intérieur. Ceci va l’aider à retrouver son calme tout en accentuant la perception des différentes parties de son corps dans l’espace et donc sa proprioception, par la compression et le tissu qui l’entoure.
7. S’asseoir sur un coussin à air ou le poser sous les pieds
Un coussin à air, avec ou sans picots, permet une assise dynamique (lorsque l’enfant est assis dessus) ou une stimulation de la voûte plantaire (lorsqu’il est placé sous les pieds). Ainsi, il aide l’enfant à se concentrer sur la tâche en cours en répondant à ses besoins de mouvements liés aux particularités des systèmes vestibulo-proprioceptifs.
>> À télécharger : « Pouvoir bouger, sans bouger pour se concentrer »
8. Attacher des élastiques aux pieds de son bureau
La mise en action et le dynamisme procurés par les élastiques installés aux pieds de table du bureau de l’enfant peuvent apporter une réponse aux besoins de mouvements liés aux particularités des systèmes vestibulo-proprioceptifs de l’enfant. Ainsi, ils vont l’aider à rester concentrer sur sa tâche (leçon de l’enseignant à écouter, écrire ce qu’il y a au tableau, faire un exercice, faire ses devoirs à la maison, réaliser une activité en ergothérapie, etc.).
9. Ramper ou marcher à 4 pattes en suivant un parcours moteur
Le parcours moteur, réalisé avec du mobilier (table, chaise…), des accessoires (coussins…) ou des modules de motricité (escalier, plan incliné…), permet à l’enfant de libérer son énergie tout en sollicitant des compressions articulaires variées. Passer sous des chaises, par exemple, peut l’aider à percevoir plus facilement les différentes parties de son corps en mouvement dans l’espace, et donc stimuler sa proprioception.
10. Tirer ou sauter à la corde
Tirer une corde à deux et faire de la corde à sauter sont des activités qui permettent la compression articulaire et musculaire de l’ensemble du corps. Cette activité sollicite la proprioception par la force dynamique. L’enfant répond au besoin de se dépenser. Il pourra alors revenir à un temps plus calme et à un niveau d’attention plus adapté.
11. Marcher de différents pas sur une ligne
Marcher de différents pas (ex. : pointe des pieds, à reculons, à cloche-pied, en sautant…) sur une ligne (droite ou sinueuse) va mettre en jeu le système proprioceptif de par la force exercée par les membres inférieurs sur le sol et le contrôle du corps nécessaire. La concentration est donc sollicitée pour effectuer les mouvements et placer les différentes parties de son corps convenablement, les unes par rapport aux autres, pour produire les pas sur la ligne.
12. Imiter la marche des animaux en suivant des empreintes sur le sol
Imiter la marche des animaux en suivant des empreintes au sol (par exemple : sauter comme une grenouille ou un lapin, marcher au trot comme le cheval, etc.) va solliciter le contrôle postural, la stabilité du tronc et des épaules ainsi que des hanches. Ainsi, l’activation du système proprioceptif sera réalisée par les compressions articulaires et musculaires variées.
13. Suivre des empreintes de mains ou de pieds sur un plan vertical
L’enfant peut suivre des empreintes de mains ou de pieds sur un plan vertical (en position allongée sur le dos au sol, pieds au mur ou encore debout, mains en appui au mur). Cette activité va solliciter le contrôle des 4 principaux membres du corps dans l’espace de façon tridimensionnelle. Ainsi, les compressions articulaires et musculaires seront différentes des sollicitations proprioceptives habituelles.
14. S’allonger ou se déplacer sur une planche à 4 roulettes
La planche à 4 roulettes, telle que la planche de surf ou la planche maxi roller, est une activité qui stimule le système vestibulo-proprioceptif de façon très complète. L’enfant place son corps en appui contre la planche. Il exerce ainsi une pression profonde au niveau du tronc et sollicite le contrôle postural de tout le haut du corps.
Par une force dynamique, l’enfant va ensuite pouvoir se déplacer (accroupi, à plat ventre, sur les genoux ou debout) en mettant ses mains en appui au sol, en tirant sur une corde rattachée à la planche ou à l’aide de pagaies. De cette façon, il sollicite de nouveau son contrôle postural, mais aussi l’équilibre, la coordination bilatérale, l’orientation spatiale, la conscience des risques…
15. Tourner dans une toupie
La toupie géante entoure le corps de l’enfant, ce qui renforce la perception des différentes parties de son corps dans l’espace. À cela s’ajoutent des stimulations vestibulaires et proprioceptives par la force dynamique qu’exercent les mouvements de rotation de la toupie. La toupie développe aussi les capacités de contrôle postural, d’équilibre et de coordination de l’enfant. Après cette activité qui demande beaucoup d’énergie et de sollicitations sensorielles, l’enfant pourra alors revenir au calme et retrouver un seuil d’attention attendu.
16. Faire des roulades (nécessite un tapis de jeu)
Les roulades, par la nécessité de contrôle des différents mouvements du corps et de la posture, sollicitent des contractions musculaires et articulaires très variées sur tout le corps de l’enfant. Ainsi, lorsqu’elles sont réalisées de manière sécuritaire, sur un tapis de jeu ou dans l’herbe par exemple, elles vont permettre à l’enfant d’activer globalement son système proprioceptif. Après la décharge d’énergie due à plusieurs réalisations de roulades, l’enfant peut montrer une meilleure concentration pour une tâche cognitive demandée. L’avantage est que cette activité peut être proposée autant à l’école (dans une salle prévue à cet effet) ou à la maison.
17. Faire des postures de yoga ou des exercices de gainage
Les postures de yoga (comme le cobra) ou les exercices de gainage (costal ou ventral) sont des activités proprioceptives à forte composante physique. En effet, elles impliquent le contrôle de la posture, la contraction des différentes chaînes musculaires, des pressions profondes, une force dynamique importante, etc. Elles peuvent donc aider l’enfant au retour au calme.
>> À télécharger aussi : « Enfant et bien-être : 5 activités de pleine conscience »
18. S’allonger ou rebondir sur un gros ballon
Le fait de monter, de rebondir et de garder la position sur un gros ballon favorise la proprioception. Cela développe la coordination motrice, l’équilibre, le contrôle postural du tronc, la stabilité et le renforcement musculaire de tout le corps. Le gros ballon peut être proposé pour les tout-petits pour des temps sur le ventre. Il peut aussi être utilisé pour faire des massages. L’enfant est allongé sur le ventre au sol. Le parent roule le ballon sur son tronc, ses jambes et ses bras pour une entrée sensorielle tactile et proprioceptive.
19. Sauter dans des cerceaux ou faire un jeu de marelle
Sauter dans des cerceaux de façon aléatoire au sol ou faire un jeu de marelle, stimule les systèmes vestibulo-proprioceptifs de l’enfant. En effet, l’action de sauter va lui permettre de se repérer dans l’espace en positionnant son corps de façon adéquate entre son point de départ et son point à atteindre, tout en compressant les articulations de ses membres inférieurs. Cette action va également solliciter l’équilibre, les coordinations, la planification motrice (viser l’endroit où atterrir) … Très dynamiques, ces activités permettent à l’enfant d’y mettre toute son énergie avant de pouvoir revenir au calme.
20. Faire tous les jeux de motricité fine allongés sur le ventre
La position allongée sur le ventre est très intéressante pour le système proprioceptif. En effet, elle sollicite de nombreuses fonctions comme la force dynamique et soutenue de la posture et le contrôle de celle-ci. Elle met en jeu les muscles extenseurs du tronc ainsi que la compression des articulations des membres supérieurs (l’enfant doit stabiliser ses épaules et tenir en appui sur ses avant-bras pour jouer). Cette posture peut donc avoir un effet calmant pour l’enfant.
Activité bonus : Le portage du jeune enfant, lorsqu’il est proposé de manière sécuritaire et en respectant le corps du bébé peut parfois apporter une réponse physiologique calmante. En effet, les déplacements en portage mettent en jeu les systèmes vestibulo-proprioceptifs de l’enfant porté qui, tout contre son parent, suit ses mouvements lorsqu’il marche. Il peut présenter des effets « anti-stress » et apaisants pour certains bébés / enfants. Il peut également aider à réduire l’agitation du bébé / jeune enfant et participer à la régulation sensorielle par le système nerveux central.
Télécharger gratuitement l’infographie réalisée avec Marie et Flora, ergothérapeutes :
Mes mini-pauses proprioceptives
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Flora Yahiaoui est ergothérapeute libérale à la maison médicale du Miroir d’Eau de Savigny-le-Temple (Seine-et-Marne). Elle est spécialisée dans l’accompagnement des enfants avec des troubles du spectre autistiques (formée à la méthode TEACCH, l’intégration sensorielle, au Snoezelen, aux troubles alimentaires, au PECS et Makaton) et au guidage parental auprès des tout-petits (repérage des signes précoces de TSA, troubles sensoriels et retard de développement).
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Marie Mongazon est ergothérapeute libérale et monitrice de portage physiologique à Surgères (Charente-Maritime). Formée aux troubles du spectre de l’autisme et prise en charge en ergothérapie, à l’intégration sensorielle, au repérage et à la prise en charge globale et sensori-motrice « précoce » du bébé (dont le bébé à risques, présentant des difficultés dans son développement sensori-moteur). Accompagnement à la parentalité par des ateliers de portage physiologique et de « développement sensori-moteur de l’enfant de 0 à 3 ans ».
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Article publié le 14 octobre 2020, modifié le 5 février 2021.